Temps partiel : pas de passage à temps complet par avenant temporaire!

Dans un arrêt du 21 septembre 2022, la Cour de cassation juge pour la première fois, de manière précise et claire, la question des conséquences de l’atteinte, y compris temporaire, de la durée légale de travail par un salarié soumis à un temps partiel.

Pour rappel, depuis la Loi n°2013-504 du 14 juin 2013 de « Sécurisation de l’emploi », l’article L 3123-22 du Code du travail permet qu’une convention ou un accord de branche étendu puisse prévoir la possibilité, par avenant au contrat de travail, d’augmenter temporairement la durée du travail prévue par le contrat.

L’avenant au contrat de travail doit ainsi mentionner les modalités selon lesquelles des compléments d’heures peuvent être accomplis au-delà de la durée de travail fixée par le contrat de travail, conformément à l’article L 3123-6 du Code du travail : auquel cas, les heures prévues par l’avenant ne sont pas des heures complémentaires et ne donnent pas lieu à majoration, sauf si l’accord collectif le prévoit.

Or, qu’en est-il lorsque, par avenant contractuel, temporaire, les parties entendaient porter la durée de travail à hauteur de la durée légale ?

Une incertitude initiale quant à l’esprit du législateur demeurait puisque si le Rapport de la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale indiquait que « rien n’interdit que le dispositif des compléments d’heures puisse permettre au salarié d’atteindre temporairement la durée légale du travail, auquel cas son contrat est assimilable à un contrat à temps plein le temps de la durée de l’avenant » (rapport AN Germain n°847), le rapport du Sénat l’interdisait (rapport Sénat n°801).

Certaines conventions collectives prévoyaient également cette possibilité de porter par avenant contractuel temporaire, la durée d’un contrat à temps partiel à hauteur de la durée légale (cf. par exemple : CCN du personnel des cabinets médicaux : Avenant n° 64 du 1er juillet 2014 relatif au travail à temps partiel).

Or, cette incertitude comme ces textes conventionnels appartiennent désormais à un temps révolu.

En effet, la Cour de cassation a tranché pour la première fois, mais dans sa lignée jurisprudentielle particulièrement restrictive s’agissant du temps partiel, que la conclusion d’un avenant de complément d’heures à un contrat de travail à temps partiel, en application d’une convention ou d’un accord collectif étendu conclu en application des dispositions légales, ne peut pas avoir pour effet de porter la durée du travail convenue à un niveau égal à la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement.

Il convient donc de veiller à arrêter cette pratique consistant à porter la durée d’un temps partiel à hauteur de la durée légale, y compris, par voie d’avenant, y compris lorsqu’un texte conventionnel le permet et y compris lorsque cet avenant résulterait d’une demande émanant du salarié lui-même !

A défaut, le risque pour l’employeur est particulièrement important puisque le requalification de la relation de travail en temps complet serait prononcée, comme l’a jugé à plusieurs reprises la Cour de cassation (cf. notamment Cass. soc. 12 mars 2014 n°12-15014).